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Reporting ESG; et si on mesurait mieux?

LE REPORTING Extra financier 

Mesurer la performance environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) de l’entreprise par des indicateurs, c’est le but du reporting extra-financier. C’est un pas de plus vers la transparence. Mais la profusion des données collectées peut vite transformer l’exercice en usine à gaz. Les petites et moyennes entreprises en font l’amère expérience. Il est nécessaire de trouver des indicateurs plus pertinents.

Le reporting RSE est une bonne occasion pour :
- Se poser les questions de la performance
- Prendre chaque item du référentiel sur lequel on s’appuie et voir si les aspects de la 
performance sont liés 
- Quantifier ces liens 
- Identifier les indicateurs clés pour chaque item 
- Identifier les PP, intérêt et attentes 
- Avoir une matrice finale des indicateurs 
- Piloter sa démarche 

Quels outils puis-je mettre en place, en interne et en externe ? 
- 4 mots clefs : Transparence, crédibilité, humilité, authenticité 
- Des exemples concrets plutôt que des déclarations d’intention 
- Diffuser les objectifs et les résultats 
- Ne pas communiquer en externe avant le travail en interne 
- Jouer sur la proximité et l’évènementiel afin de donner envie 

 Ce que rapporte la démarche RSE à l’entreprise : 
- Fierté d’appartenance des collaborateurs 
- Connaître les vraies valeurs sur lesquelles travailler et construire 
- Maillage fort vertical et horizontal 
- Nouvelles réflexions (handicap, gaspillage, temps partiel, écoconception) 
- Création de valeur et de cohésion 

Le reporting extra-financier est dans une nouvelle dynamique. En France, les nouvelles règles du jeu issues du Grenelle II (article 225) commencent à être intégrées et l’Union européenne va prochainement se doter d’une réglementation en la matière. D’autres pays, y compris les émergents, veulent également y venir. 
Cette tendance ouvre la voie à une meilleure prise en compte des externalités et à plus de transparence. Mais l’influence grandissante de la mise en chiffres des actions RSE (responsabilité sociale des entreprises) a son revers. Dans les grandes entreprises cotées, soumises depuis longtemps à l’obligation de l’exercice, l’organisation a couramment permis de faire de la multiplication des indicateurs un "aiguillon" pour la mise en musique de la stratégie RSE et un atout indispensable à la mesure de son impact. Mais dans les plus petites, c’est souvent une autre histoire.

Les indicateurs ne doivent pas se substituer à la stratégie !

Récemment, une directrice RSE d’un groupe de taille moyenne confiait son désarroi lors de son arrivée en poste. La prolifération d’indicateurs semblait y tenir lieu de stratégie. Pas toujours pertinents, peu expliqués à ceux chargés de les collecter et parfois même sujets à caution, une trop grande partie des indicateurs était au mieux inutilisable, au pire parasitaire pour la mise en place d’une réelle stratégie. Bref, de son aveu même, le système de reporting était devenu une vraie "usine à gaz". Son cas est loin d’être isolé.
A titre d’exemple, pour l’édition 2013 de son baromètre du reporting environnemental de l’immobilier, Novethic avait ainsi examiné plus de 1 500 pages de rapports développement durable (DD) pour analyser les 61 entreprises de son périmètre !
La RSE a généré un tel volume de données qu’elle est confrontée à leur gestion et aux problèmes dits de "big data". Dans sonbaromètre Développement durable RSE, BDO-Malakoff-Médéric pointe lui aussi le paradoxe. Certes, la majorité des responsables RSE interrogés se rejoignent sur la nécessité de mesurer l’efficacité des actions RSE grâce à  des indicateurs, mais ils sont tout autant à exprimer leur difficulté à le faire, faute d’outils cohérents et communs entre entreprises.

L'overdose de données

L’overdose n’est pas loin non plus du côté des investisseurs et des administrateurs, qui doivent aussi faire face à la surabondance des informations comptables et financières, sans qu’elles répondent toujours à leurs besoins.
La première étape vers la clarification du reporting extra-financier est la construction d’indicateurs pertinents. Les nouveaux dispositifs français et européen y contribuent en demandant aux entreprises de cibler des indicateurs phares et d’expliquer en quoi ils sont cruciaux pour leur métier. Ils ouvrent aussi la voie vers le reporting intégré, qui consiste à mêler les données financières et extra-financières clefs pour expliquer comment l’entreprise crée de la valeur.
Mais celui-ci n’est déployé que par quelques pionniers. Pour passer de la mesure exhaustive à l’analyse pertinente de la stratégie, la RSE a besoin d’un nouvel élan apporté par ces entreprises leaders, capables d’entraîner les autres.
Article Novethic - Béatrice Héraud © 2014 Novethic - Tous droits réservés

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REPORTING INTÉGRÉ : LES RAISONS DU RETARD FRANÇAIS

Document de synthèse qui présente de façon concise la vision prospective de l’entreprise, ainsi que sa stratégie et ses performances financières et ESG sur le moyen et long terme, le reporting intégré a des adeptes dans le monde entier. Plus de 3 000 entreprises ont franchi le pas. Mais seulement très peu en france. Pourquoi ? Éléments de réponse.
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La bonne entreprise résumée en 5 points:
1° Principe d'intégrité; droits des Hommes, du travail, le respect des principes de base comme la lutte contre la corruption.
2° Regarder au delà de ses mûres, la société dans laquelle on vit: pauvreté, conflits, travailleurs sous éduqués, ressources non infinies et biodiversité: n/planète détérioré.
3° Pousser nos employés et nos partenaires commerciaux et syndicaux vers ces objectifs.
4° Valoriser des relations à long terme basés sur la confiance et la transparence. Aussi écouter et travailler des critiques constructives.
5° Accepter que dans le monde il y a des différentes manières d'affronter ces défis avec des différentes idées. Pour mieux apprendre il faut faire partie de groupes de travail.
Illustration
istock

Au mois de mars, une enquête de Paris Europlace sur une trentaine d’entreprises (dont la moitié du CAC 40) constatait le manque d’allant des entreprises françaises sur le reporting intégré (RI). Si elles connaissaient l’initiative de l’IIRC (International Integrated Reporting Council) seules trois d’entre elles déclaraient être engagées dans une expérimentation : Engie (anciennement GDF-Suez), qui s’est fortement inspirée de la démarche sans y participer, pour son rapport de 50 pages ; Vivendi, qui a réalisé un projet pilote de trois pages axé sur la diversité culturelle dans son document de référence 2014 ; et Danone, qui a annoncé une publication en ligne pour l’an prochain. Si d’autres, comme Sanofi, BNP Paribas, Atos ou Mazars travaillent aussi sur le sujet, la liste reste tout de même très courte.

Le reporting intégré, un objectif nouveau


"Trop complexe et chronophage" ou "trop coûteuse" avancent les entreprises françaises pour expliquer leur manque d’entrain. Et pourtant, "ce sont sans doute celles qui sont le mieux armées pour le faire, parce qu’elles ont été les premières à s'engager dans ce type de démarche. Mais cela peut aussi les avoir enfermées dans une logique spécifique", souligne Philippe Peuch-Lestrade, vice-président de l’IIRC.
Grâce aux lois de nouvelles régulations économiques (NRE) et celles issues du Grenelle de l'environnement, les grandes entreprises sont soumises à des obligations de reporting environnemental et social depuis plus de dix ans. Manier des indicateurs extra-financiers ne leur pose donc aucun problème, mais le reporting intégré change la finalité de l’exercice.
En effet, l’objectif n’est pas simplement de collecter des données (en constante inflation) mais bien de donner une vision globale et intelligible du business model, de la stratégie, de l’organisation et de la gouvernance de l’entreprise, avec un nombre restreint mais choisis d’indicateurs pertinents pour son écosystème. Des indicateurs qui permettent d’expliquer la création de valeur à court, moyen et long terme.

Se saisir de l'outil pour définir la création de valeur


Ces indicateurs relèvent de ce que les investisseurs appellent la "matérialité", c'est-à-dire des sujets dont le coût est mesurable pour l’entreprise, à l’image du climat pour les producteurs d’énergies fossiles.
Le reporting intégré devrait donc être l’outil idéal du dialogue entre entreprises et actionnaires. Or, en n’adoptant pas cette démarche, les entreprises laissent leurs actionnaires définir les critères dits "matériels" sur lesquels ils fondent leurs évaluations.
"C’est pourtant aux entreprises de définir les points clefs sur lesquels repose leur création de valeur" explique Robert Eccles, professeur à Harvard et promoteur du concept "One report", en visite à Paris. "Elles doivent être à même de l’expliquer à leurs actionnaires, et de faire porter la définition de cette stratégie par le conseil d’administration." Il ajoute : "L’une des plus grandes vertus de ce travail est d’obliger les directions financières, celles des ressources humaines ou encore des achats, sans oublier la RSE, à dialoguer pour construire ensemble ce reporting intégré".
Engie (anciennement GDF-Suez), pionnière en France, a mis un an, dont plusieurs mois de consultation avec une cinquantaine de parties prenantes (investisseurs ISR et analystes, ONG, grands comptes, fournisseurs, sous-traitants, collectivités locales, actionnaires individuels, salariés) avant de publier un rapport de moins de 50 pages, en février 2015.
Et si la démarche est aujourd'hui mise en avant par le Groupe, il faut souligner que la direction financière "ne s’y est pas engagée de gaieté de cœur", avouait Marie Gérard, la vice-présidente du management et de la performance RSE d’Engie, lors d’une conférence de l’Executive MBA ESSEC le 11 juin dernier.

Redonner du sens à la communication financière et extra-financière


Chez Vivendi, qui a lancé son projet pilote de RI en 2013, on explique que le coût est relativement minime. Peut-être parce que le reporting intégré est la "suite logique" d’une démarche entamée en 2003. "Nous faisons depuis longtemps le lien entre la RSE et la création de valeur. En tant que media, nos enjeux RSE sont assez spécifiques. Par exemple, il nous a fallu expliquer dès 2006 en quoi la diversité culturelle était à la fois au cœur de notre responsabilité et source de valeur pour Vivendi, notamment lors de road shows organisés pour nos investisseurs. Les directions financières  du groupe étaient donc déjà mobilisées", rapporte ainsi la directrice de la responsabilité sociétale du groupe, Pascale Thumerelle.
Le jeu en vaut la chandelle. "C’est très mobilisateur en interne. Et pour les parties prenantes externes, cela leur permet d’avoir une vision synthétique de l’entreprise, de sa stratégie et de ses missions. Cela permet de donner de la chair aux chiffres financiers", reprend-elle. Un groupe de travail régulier va d’ailleurs travailler à partir de juillet pour approfondir la réflexion sur le RI et les bénéfices apportés aux différentes parties prenantes du groupe.
Même satisfecit chez Danone, qui travaille à la publication d’un rapport intégré, sous forme de site internet prévu pour l’an prochain : "La qualité de démonstration devrait être bien meilleure que celle du rapport développement durable que nous publiions jusqu’à présent, et qui sera du coup inutile. En interne, la démarche du RI est aussi un outil superpuissant de mobilisation, car il permet de comprendre de façon très structurée le business model de l’entreprise et là où elle veut aller."
"Aujourd’hui, plus personne ou presque ne lit les centaines de pages de reporting produites par les entreprises. Le reporting intégré, en retenant 6 capitaux de l’entreprises [financiers, industriels, humains, intellectuels, naturels et sociaux, ndlr], redonne du sens à la communication financière de l’entreprise. Il donne une vision claire et concise de la stratégie, de sa valeur? et donne les éléments pour se projeter dans le temps3, estime de son côté Laurent Maheo, le  président de la DFCG (Association Nationale des Directeurs Financiers et de Contrôle de Gestion) en Île-de-France.
"C’est un bon outil pour se poser les bonnes questions", abonde Stéphane Voisin, responsable de la recherche ESG chez Kepler-Cheuvreux. "Mais la plupart des reporting intégrés sont encore décevants.  Ils restent très conceptuels et les enjeux sont mal adressés."
Les entreprises françaises relèveront-elles le défi ? Ce serait d’autant plus cohérent que le reporting intégré est devenu obligatoire dans certains pays, comme l’Afrique du Sud, et que la directive européenne sur le reporting extra-financier les pousse dans cette voie.


Cet article a initialement été publié dans la lettre professionnelle de Novethic "L'essentiel de la RSE" n°110, juillet 2015

Béatrice Héraud et Anne-Catherine Husson-Traore
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